2017 - 2020

« Les Services de Santé Mentale face aux situations complexes et/ou chroniques » : Une démarche d’évaluation qualitative des pratiques cliniques et de réseau dans une perspective thérapeutique

Commanditaires : SSM La Gerbe, SSM L’Adret, SSM Anaïs, SSM Primavera
Chercheurs-intervenants associés : Raphaël Darquenne
Partenaires : Réseau MAG

Le Décret relatif à l’offre de services ambulatoires dans les domaines de l’action sociale, de la famille et de la santé du 5 mars 2009 prévoit que chaque Service de Santé Mentale procède à une Démarche d’Evaluation Qualitative (DEQ) portant sur une thématique choisie par le Service et sur laquelle il travaille durant trois années.

« La démarche d’évaluation qualitative vise l’amélioration du service proposé aux bénéficiaires et à la population dans son ensemble en termes de prévention, d’aide ou de soin, compte tenu des moyens disponibles en effectifs, ressources financières et structures. » (Art. 169. § 1 du Décret)

Suite à la réalisation de plusieurs DEQ, différents SSM se sont regroupés au sein d’un groupe de travail d’où sont (entre-autres) ressortis la plus-value de réaliser des DEQ conjointes et la pertinence de mettre au travail la prise en charge des situations « complexes » auxquelles peuvent être associés des notions comme « la psychose », les « cas lourds », les « troubles chroniques », les « retards de développement », la nécessité d’une « prise en charge multiple »,…

Ces Services souhaitent « s’interroger sur et évaluer les pratiques des équipes pluridisciplinaires au sein des SSM autour de situations complexes et/ou chroniques », identifier et mettre en évidence « ce qui fait soin » dans les pratiques avec ces publics, que ce soit au niveau clinique ou au niveau du réseau (réseau du sujet, réseau de prise en charge, réseau de soin).

Ce questionnement prend place dans un contexte d’évolution des politiques et pratiques de santé mentale. Si les SSM ont vu le jour en tant qu’alternatives pertinentes à la psychiatrie hospitalière pour accompagner ces personnes « en situation complexe et/ou chronique », certaines constats et certaines tendances peuvent être mis en évidence :

  • La complexité et la chronicité des situations des personnes en termes de santé mentale connaissent un accroissement significatif liés à des phénomènes d’exclusion, de disqualification et de désaffiliation sociales de plus en plus importants.
  • La complexification des situations socio-psychologiques semble devenir un facteur important dans l’accessibilité aux soins et dans la pénibilité du travail dans le secteur psycho-médico-social.
  • La prise en charge des personnes « en situation complexe et chronique » représente environ 50 % du travail thérapeutique alors que cette population ne représente que 7 % des usagers des SSM.
  • La tendance à l’orientation vers les résultats entraine le risque de délaisser les personnes « en situations complexe et chronique » au profit des personnes en situation de trouble « anxio-dépressif ».
  • De nombreux patients qui pourraient être traités ailleurs que dans les SSM sont orientés ou poussés vers les SSM qui atteignent rapidement un taux de saturation.
  • Les SSM reçoivent un grand nombre de demande de consultation de personnes dont la problématique ne nécessite pas une prise en charge pluridisciplinaire (tel que les personnes souffrant de burn-out) et qui pourraient aller à des consultations en privé si elles étaient plus accessibles. Ces situations saturent les consultations à défaut de situations nécessitant un dispositif plus conséquent et plus proches de leurs missions et pour lesquelles ils estiment devoir mettre la priorité.
  • Chaque service a créé ses propres dispositifs pour rencontrer ces situations, il y a de la diversité dans les pratiques.

Eu égard à ces différents éléments de contexte, les SSM demandent au Réseau MAG de les accompagner sur le plan méthodologique pour réaliser un processus participatif de co-analyse des situations, problématiques, besoins, enjeux et pratiques relatifs à la prise en charge (clinique et en réseau) des bénéficiaires qui présentent une problématique complexe et chronique à des fins évaluatives, formatives et de co-construction de perspectives pratiques et sociétales.

Les SSM « souhaitent mettre en exergue les implications en termes de temps et de ressources du travail avec des bénéficiaires qui présentent une problématique complexe et chronique, des bénéficiaires avec lesquels ils sont amenés à travailler à plusieurs.

Les SSM sont intéressés de se pencher sur des temporalités différentes, le travail de crise qui nécessite un déploiement d’un dispositif important en un temps court, ou le travail qui nécessite une prise en charge multiple sur le long terme…

Il leur paraît important d’envisager une question qui permette d’approcher tant la population rencontrée par les équipes adultes que celle rencontrée par les équipes infanto-juvéniles.

Avec cette DEQ, il s’agit de rendre compte des moyens et outils mis en œuvre pour le suivi de personnes dans une situation chronique et complexe, et évaluer si ce qui leur est proposé aujourd’hui rencontre leurs besoins.

Les SSM envisagent de se focaliser sur les situations qui impliquent au moins trois intervenants et durent dans le temps. »

Ces différents constats amènent les SSM à souhaiter mettre en œuvre une DEQ devant permettre de :

  • identifier et mettre en évidence « ce qui fait soin » (« care »/« cure » « aide aux personnes »/ « santé ») dans les pratiques avec les publics en situation complexe et/ou chronique que ce soit au niveau travail clinique ou au niveau du travail en réseau
  • rendre compte de la complexité et des spécificités des situations des personnes et du travail thérapeutique (et en réseau) aux acteurs sociaux
  • construire une analyse commune à partir des réalités des différents SSM impliqués et des perspectives pratiques (pour le travail clinique et en réseau) et sociétales

Le projet est donc un processus participatif de co-analyse des situations, problématiques, besoins, enjeux et pratiques relatifs la prise en charge (clinique et en réseau) des bénéficiaires qui présentent une problématique complexe et/ou chronique et de co-construction de perspectives pratiques et politiques.

L’analyse peut s’envisager au niveau de 3 types de pratiques : Les pratiques professionnelles (clinique), organisationnelles (réseau interne) et de réseau (externe) et peut comprendre la relation de ces pratiques avec les besoins des publics.

L’analyse permettra d’approcher tant la population rencontrée par les équipes adultes que celle rencontrée par les équipes infanto-juvéniles en prenant en compte les spécificités des situations.